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Mot du président – nov 2019

Terres des sœurs de la Charité, hausse de la valeur des terres en milieu agricole, demandes de promoteurs pour construire en zone verte, demandes des municipalités de pouvoir installer de nouvelles familles en région, tous ces éléments ont en commun l’aménagement du territoire. Le territoire est une denrée convoitée, d’autant plus qu’il ne s’en fabrique plus depuis un bon moment.

À la fin des années 70, le Québec a voté la loi sur la protection du territoire agricole et mis en place la fameuse CPTAQ (Commission de protection du territoire agricole du Québec). 40 ans plus tard, force est de constater qu’une sérieuse mise à jour est de mise. En effet, pour d’étranges raisons, la CPTAQ considère qu’une ferme de moins de 100 hectares n’est pas rentable, sauf exception. Pourtant, l’immense majorité des fermes sur la planète sont plus petites que 100 ha. Et pourquoi exigerait-on d’une ferme qu’elle soit rentable. On ne s’en soucie pas pour tous les autres secteurs de l’économie. La conséquence de cette vision est extrêmement néfaste pour les néo-agriculteurs, peu désireux de s’endetter avec d’immenses surfaces. 100 ha, c’est quand même un kilomètre carré! Et si la CPTAQ désirait protéger les meilleurs sols, pourquoi a-t-elle permis l’étalement urbain aux abords de Montréal ou de Québec?

Le gouvernement vient de déposer un projet de loi visant à réduire le fardeau de la taxation foncière pour les agriculteurs, évidemment sous la pression de l’UPA. En effet, même si les fermiers peuvent obtenir un remboursement d’environ 70% de leurs taxes foncières, il reste quand même 30% à payer et la valeur des terres a explosé. L’UPA demande donc au gouvernement, donc au contribuable, d’absorber cette hausse. Évidemment, les municipalités ne sont pas emballées par ce projet, parce que la facture sera refilée aux autres citoyens. Les routes doivent encore être entretenues…

Mais on peut se demander pourquoi la valeur des terres a ainsi augmenté. J’estime qu’il faudrait d’abord faire en sorte qu’il soit possible de tirer un revenu décent avec une petite surface agricole au lieu de devoir accroître sans cesse les surfaces. Pour ce faire, il faut d’abord permettre la plus-value à la ferme, comme la transformation, la restauration, les tables champêtres, l’hébergement à la ferme, l’abattage des animaux, soit des opérations économiquement intéressantes qui sont pour l’instant largement prohibées. Il faudrait ensuite faire appliquer la loi sur la mise en marché des produits agricoles, bloquée par la Régie des marchés agricoles, pour permettre la production pour vente au consommateur. Or, sans ultra-dispendieux quota, impossible de produire du poulet, des œufs, du lait, du lapin, du dindon, alors que le gouvernement importe les mêmes denrées à grand volume de l’étranger. On importe tout en interdisant la production locale. Un beau cas de schizophrénie…

Ensuite, il faudrait revoir le mode de financement de notre agriculture, largement orienté vers les grandes superficies et l’exportation, ce qui augmente la pression sur le prix des terres. En somme, tout le système agricole du Québec pousse les fermiers à augmenter leurs surfaces. Rien de surprenant à ce que le prix des terres s’envole.

Si rien d’autre n’est fait que de refiler les taxes foncières aux autres citoyens, il y a fort à parier que rien ne sera réglé. La solution réside dans une refonte de la CPTAQ, de la Régie des marchés agricoles, de la Financière agricole et de l’influence démesurée de l’UPA sur l’ensemble.

Maxime Laplante, agr, président