Communiqué – Pour diffusion immédiate
Québec, 7 juillet 2021 – L’Union paysanne souhaite revenir sur les nominations de la directrice et du président de l’Institut de technologie agroalimentaire.
D’abord, nous souhaitons prendre nos distances face aux propos tenus par Roméo Bouchard envers madame Aisha Issa. Nous insistons : Roméo Bouchard ne fait plus partie de l’Union paysanne depuis 2006 et, même s’il a fondé l’organisation, il n’y participe plus depuis 15 ans. Rabaisser la nomination de madame Issa en laissant sous-entendre qu’elle n’est là que pour remplir un quota est inacceptable. Ce sont des propos racistes et misogynes que nous dénonçons haut et fort.
Si l’Union paysanne s’inquiète de ces nominations, c’est pour des raisons toutes autres. D’une part, nous croyons qu’elles reflètent la volonté du ministre de l’Agriculture de développer l’agriculture numérique et l’intelligence artificielle, et d’autre part, d’augmenter sa proximité avec le milieu des affaires. En effet, nous croyons fermement que l’agriculture doit demeurer accessible et axée sur l’objectif de nourrir les communautés, et non pas s’inscrire dans un système mondial de gestion de données, d’investissements dans les terres agricoles et de compétition. Cette approche participera non seulement à la disparition des paysan.nes, mais aura aussi pour conséquence de rendre le métier d’agriculteur.trice inaccessible et d’en faire une activité de gestion de portefeuilles pour hommes et femmes d’affaires.
La nomination de Alain Chalifoux comme président de l’ITA ne nous apparaît pas être une candidature indépendante. Rappelons que monsieur Chalifoux fut président du Conseil des industriels laitiers du Québec en plus d’avoir repris les rênes du Groupe Laitier Chalifoux, englobant la Laiterie Chalifoux et Maison Riviera. Bien que ce soient des entreprises québécoises qui réussissent bien, il s’agit encore là d’un modèle agricole industriel, axé sur l’expansion et le profit. Or, la raison d’être d’une institution d’enseignement ne devrait-elle pas être axée sur l’apprentissage et le transfert de connaissances, et donc s’extraire des logiques marchandes?
Bref, si le ministre Lamontagne cherchait une personne ayant un profil numérique de gestion de données pour la nommer à la direction de l’ITA, il aura trouvé une excellente candidature avec madame Issa. Et si le ministre voulait que le grand patron, le président, soit un membre influent de l’industrie agroalimentaire, monsieur Chalifoux fera l’affaire. Le problème avec cette vision de l’agriculture est qu’elle occulte la paysannerie et la fonction nourricière de l’agriculture. Il ne s’agit surtout pas d’un enjeu de couleur de peau et de genre de la personne choisie…
Bien que cela déplaise à Roméo Bouchard, la paysannerie n’est pas qu’une affaire d’hommes blancs. Rappelons que l’Union paysanne est membre de la Via Campesina, le plus grand mouvement paysan au monde. Nous soulignons le rôle fondamental des femmes rurales et de l’ensemble de la paysannerie, lesquelles se trouvent en première ligne de la production d’aliments agroécologiques et sains, en plus de produire 60% de toute la production mondiale.
À propos de l’Union paysanne
L’Union paysanne représente les paysans et paysannes du Québec et regroupe tous ceux et celles qui militent pour des souverainetés alimentaires adaptées aux territoires. Elle croit à l’atteinte des souverainetés alimentaires par une agriculture écologique et paysanne, en vue de procurer à notre population une nourriture saine et diversifiée, dans le respect de la nature, des sols, des animaux, de l’environnement et des communautés ; d’autre part, sur l’habitation du territoire, de façon à assurer le maintien de campagnes vivantes et une paysannerie forte, nombreuse et plurielle.
À propos de la Via Campesina
La Via Campesina est un mouvement international qui rassemble 164 organisations locales et nationales dans 73 pays d’Afrique, d’Asie, d’Europe et des Amériques. Elle représente environ 200 millions de paysannes et de paysans. C’est un mouvement autonome, pluraliste et multiculturel, politique de par sa demande de justice sociale mais sans aucune affiliation politique, économique ou autre.
Fortement enracinée dans un esprit d’unité et de solidarité entre ces groupes, elle défend l’agriculture paysanne et la souveraineté alimentaire comme moyen pour promouvoir la justice sociale et la dignité. Elle s’oppose clairement à l’agriculture industrielle et aux entreprises multinationales qui détruisent les relations sociales et l’environnement.
Les femmes ont un rôle central dans la Via Campesina. Le mouvement défend leurs droits et l’égalité des genres. Il lutte aussi contre toutes formes de violence contre les femmes. Les jeunes ont également une place très importante et sont la force inspiratrice du mouvement.